C’était censé être un trajet rapide. Allez faire des courses dans la petite épicerie qui plait tellement à Gaïa, malgré le fait qu’elle soit assez loin d’où elle habite. Mais c’est le seul endroit où elle trouve des épices mexicaines, et elle en a vraiment besoin pour le brunch qu’elle compte servir à son frère dans quelques jours. Elle avait décidé de faire une partie du trajet à pied, vu que les rues de Paris étaient bouchées à cette heure. Et puis, il faisait beau dehors. Elle prit donc son temps pour faire ses cours, car pour une fois, elle le pouvait. Elle ne savait pas comment elle avait réussi à avoir un trou aussi énorme dans son emploi du temps, mais elle était ravie. Elle ressortit ensuite de la boutique avec un sac bien remplie, contente d’elle. Elle décida de couper par le parc, car cela rendait son trajet plus facile et plus court. Elle était environ au milieu de l’étendue de verdure lorsqu’une goutte atteint sa joue. Elle leva vivement les yeux vers le ciel, et constata avec horreur qu’il était désormais couvert de nuages noirs absolument énormes. Mais il faisait pourtant beau une vingtaine de minutes plus tôt ! Elle pesta contre le temps parisien, comme à peu près la plupart du temps. Accélérant le pas, elle espérait rejoindre son domicile au sec. Malheureusement pour elle, les gouttes s’intensifièrent et rapidement, elle se retrouva à courir sous un torrent d’eau. Elle regagna avec un soulagement palpable un manège qui se trouvait là, s’abritant enfin de cette pluie énorme. Elle était trempée, et heureusement que l’air était chaud malgré la pluie, car elle serait morte de froid sinon. Elle soupira, déposant son sac et remarqua finalement la présence d’une autre jeune femme. « Oh, bonsoir ! Quel temps de chien hein ? » Elle lui fit un petit sourire amical, prenant place sur le petit banc en pierre qui se trouvait là.

Se couper les cheveux à la garçonne avait été une décision mûrement réfléchie et Gaïa ne la regrettait pas. Surtout lorsqu’une averse comme celle-ci lui tombait dessus. Ainsi, elle n’avait pas besoin d’essorer les cheveux longs et épais qu’elle possédait à l’époque. Sinon, cela aurait vraiment été l’horreur. Pestant contre la pluie, Gaïa finit par sourire à la jeune femme qui s’était également abrité. Comme toute personne saine d’esprit d’ailleurs. « Oui. Mais ça ne va pas durer. » « Je l’espère, j’aimerai bien pouvoir rentrer chez moi. » Elle n’est pas si pressée que cela, mais passer sa soirée sous un manège à regarder tomber la pluie, non merci. Au moins, elle avait de la compagnie, cela aurait pu être pire. « Pour vous sécher. » Et en plus, cette compagnie lui donnait la possibilité de se sécher. « Merci beaucoup ! » Elle entreprit d’essuyer son visage, puis ses bras nus, contente d’avoir mis un jean ce jour-là. Le fait qu’il lui colle à la peau était cependant désagréable. Elle retira ses escarpins en grimaçant, espérant qu’ils ne soient pas trop abîmés. « J’ai beau habiter depuis cinq ans à Paris – et venir de Londres en plus de cela – je n’apprécie toujours pas la pluie. » Elle était du genre à raconter sa vie sans vraiment s’en rendre compte. « Et vous, vous venez d’où ? » Elle fit une boule avec le mouchoir, frottant ensuite ses mains ensemble pour se réchauffer un poil. Elle commençait quand même à avoir froid. « En passant, je m’appelle Gaïa. Et vous ? »

C’est un peu idiot pour une londonienne de ne pas aimer la pluie, mais elle n’y pouvait rien. Quand elle avait ses cheveux longs, ils frisottaient toujours en temps de pluie et Gaïa avait horreur de cela. Et puis, l’atmosphère est sombre et lourde, on ne voit pas le ciel, c’est vraiment déprimant. Tout devient gris et Gaïa n’aime pas cela du tout. Le soleil est définitivement son ami. « Dans quinze minutes le soleil sera là. » « Quel bonheur ! » Elle avait vraiment hâte que le ciel bleu les atteigne. Elle papota un petit peu toute seule, mais cela n’avait pas l’air de trop déranger l’inconnue. Ou peut-être que si, mais elle était trop polie pour le faire remarquer. « Je m’appelle Soohyun. Je viens de la Corée du sud. Si je peux vous rassurer, il pleut aussi souvent là-bas. Les saisons de pluies sont importantes, mais je suis habituée. » Elle haussa les sourcils en entendant son nom compliqué, mais rien d’étonnant. Après tout, ce n’est pas comme si elle était typée française hein. « Je vous préviens, je vais sûrement mal prononcer votre nom. Je suis nulle pour ça, mon frère arrête pas de me le reprocher. » Elle sourit en pensant à Artemis, comme toujours. « Il pleut souvent ? Je l’ignorais. J’imaginais la Corée comme un pays très chaud en réalité. » Elle croisa les bras sur sa poitrine, le bout de ses pieds nus effleurant le sol. Elle attendait que ses chaussures sèches. « Vous faites quoi dans la vie ? » « Je suis bookeuse pour l’agence New Madison, je ne sais pas si vous connaissez. » Elle adorait son métier, et en parler également. « Et vous, vous bossez dans quoi ? »

Si il y a bien une chose que Gaïa aime faire, c’est voyager. Peut-être que si elle en a l’occasion un jour, elle ira en Asie, voir ces pays d’Orient tellement dépaysant pour une occidentale. Elle espère pouvoir le faire au moins une fois dans sa vie. « Appelez-moi Soo. Ça sera mieux. Sinon, hum, la Corée est placée contre la Chine et la Russie. Du coup le pays à un climat humide l’été et froid l’hiver. On a un climat comme en France mais par période c’est juste plus pluvieux. » Elle écoute attentivement ce que lui raconte Soo sur la Corée, et cela la fascine. Elle aime apprendre de nouvelles choses sur d’autres peuples, avec d’autres coutumes et vivant à l’autre bout du monde. « Au moins, vous êtes habituée. Vous vivez en France depuis longtemps ? » Elle laisse son regard aller vers les nuages, qui laisse très doucement placent au ciel bleu que Gaïa affectionne tant. La conversation embraille sur le vie professionnelle et Gaïa sourit en apprenant qu’elle est mannequin. « Ça ne m’étonne pas, vous avez tout à fait le profil. » Elle est bookeuse après tout, elle a le coup d’œil pour reconnaître les gens susceptibles d’être mannequin. « Vous deviez être à la soirée de Divna. Vous me dites quelque chose en fait. » « Oh oui, j’y étais. Je ne me rappelle pas de vous cependant, je suis navrée. J’ai vu beaucoup trop de mondes ce soir-là. » Elle rit doucement, avant de se souvenir d’autre chose. « Mais vous devez vous rappelez de mon frère. C’était le rigolo en kilt. » Elle secoue la tête en y repensant.

« Bientôt deux ans. Et je me perds toujours autant dans Paris. » Elle rit légèrement, la comprenant parfaitement. Elle-même avait eu du mal à savoir se repérer convenablement. « En tout cas, vous parlez très bien français. » Elle-même n’avait jamais eu de grands soucis avec la langue – même si la langue française peut être une vraie bitch parfois – mais après tout, l’anglais y prend les mêmes racines. Le coréen en est bien plus éloigné. Gaïa eu un sourire léger en voyant le rougissement de la jeune fille, habituée à ce genre de réactions de la part de mannequin ne se rendant pas compte de leur beauté. Elle se perdit ensuite sur la soirée Vogue, ne pouvant s’empêcher de mentionner son frère et son fameux kilt qui avait tellement fait parler de lui. Si Soo était là-bas, elle l’avait forcément remarqué. « Artemis est votre frère ? Oh… Je le connais en effet et… Sa tenue était… Pas mal. Enfin, il a le corps pour la porter. » Elle fut franchement étonnée de savoir qu’elle connaissait Artemis. Mais après tout, c’était Artemis. Elle rit en voyant sa tentative pour d’une façon correcte que son frère était tellement bien foutu qu’il était absolument canon habillé comme ça. « Ca ne m’étonne même pas que vous connaissiez Artemis, parfois j’ai l’impression qu’il connait tout le monde. » Elle lève les yeux au ciel, plus amusée qu’autre chose. « J’ai cru que j’allais avoir une attaque en le voyant habillé comme ça. Je suis sa bookeuse en plus de sa sœur, et je n’étais même pas au courant ! Mais bon, il a de la chance d’être super bien foutu – il n’est pas mannequin pour rien après tout – alors il peut se permettre ce genre de trucs. » Elle ne tarit jamais d’éloges pour son frère, au grand damn de celui-ci. « On pourrait peut-être se tutoyer ? Vu qu’on a Artemis en commun, on va sûrement se revoir. » Elle lui sourit, avenante et amicale.